Plan de protection des meutes de loups

Découvrez quels sont les mesures et les efforts de conservation entrepris par le parc national du Mont-Tremblant afin de protéger les loups.

Puisque les loups sont présents sur l’ensemble du territoire, il est possible d’entendre les loups hurler lors d’un séjour au parc national du Mont-Tremblant. © Shutterstock
Puisque les loups sont présents sur l’ensemble du territoire, il est possible d’entendre les loups hurler lors d’un séjour au parc national du Mont-Tremblant.

Territoire du parc national du Mont-Tremblant

Depuis une dizaine d’années, le parc national du Mont-Tremblant a mis au point différents outils de gestion et de cohabitation harmonieuse avec les loups au sein de son territoire et acquis de nombreuses connaissances. L’élaboration du Plan de protection des loups du parc national du Mont-Tremblant s’ajoute à cette démarche globale entourant la présence de ce grand prédateur. Il vise dans un premier temps à mieux encadrer les actions de la Sépaq afin d’assurer la protection des meutes de loups fréquentant le territoire du parc. Comme le mentionne plusieurs auteurs, l’enjeu de tels mesures de conservation est de trouver l’équilibre dans la cohabitation avec ce grand carnivore pour limiter les comportements de fuite ou d’évitement dans les endroits fréquentés par les humains.

L’analyse des données télémétriques des loups suivis lors de l’étude effectuée sur le territoire démontre que les structures d’hébergement, tout comme les routes et les sentiers très fréquentés, sont évitées par les loups en tout temps de l’année malgré une certaine tolérance pendant la haute saison touristique. Ceci rejoint les résultats de plusieurs autres études, dont l’une effectuée dans l’Ouest canadien qui mentionne que, dans trois parcs nationaux des Rocheuses, les loups évitent une bande de 50 mètres à proximité des sentiers qui s’élargit de 50 à 400 mètres lorsque plus de deux personnes/heure les utilisent. Une autre étude sur l’interaction loup-humain ajoute qu’un loup en patrouille de territoire va cesser son activité s’il perçoit un ours ou un humain à moins de 200 mètres. Il va s’immobiliser et attendre que l’individu s’éloigne.

Les périodes de tanière et de sites de rendez-vous sont plus critiques pour la survie de ce grand canidé étant donné la présence de louveteaux qui rendent la meute moins mobile. Pour cette raison, plusieurs auteurs recommandent de maintenir une distance de deux à trois kilomètres autour d’un site de tanière connu pour éviter une relocalisation forcée au moment de la mise bas, ajoutant que la survie des louveteaux, à cause de la moins grande mobilité associée à leur âge, repose plus sur la période de l’année que sur l’intensité et le type d’activité humaine exercé.

Le Plan de protection des loups du parc national du Mont-Tremblant propose un périmètre de protection autour des sites plus sensibles ainsi que des balises entourant la pratique d’activités sur le territoire en fonction de la période de l’année. Voici quelques exemples :

  • Les mesures de protection varient selon le zonage du parc. Les nouveaux projets et travaux en zone de service et d’ambiance requièrent une caractérisation plus attentive par un technicien dans un rayon de 500 mètres afin de valider l’activité des loups; en zone de préservation, les travaux devront faire l’objet d’une caractérisation sommaire des signes de présence. Dans tous les cas, un plan de travail sera requis au préalable et approuvé par le responsable de la conservation et de l’éducation.
  • Travaux d’entretien :
    • Zone de service et d’ambiance :
      • Tanière active : aucune activité d’entretien entre le 15 mars et le 31 juillet ET à moins de 1500 mètres;
      • Site de rendez-vous actif : aucune activité d’entretien entre le 1er aout et le 30 septembre ET à moins de 500 mètres.
    • Zone de préservation :
      • Aucune activité d’entretien entre le 15 mars et le 30 septembre ET à moins de 2500 mètres d’une tanière ou d’un site de rendez-vous actif.
  • Activités offertes à la clientèle : adaptation de l’accessibilité au réseau routier et aux sentiers de randonnée en fonction de la période biologique du loup ainsi que des tanières et des sites de rendez-vous connus;
  • Fermeture de l’arrière-pays du lac des Mocassins entre le 15 mars et le 30 septembre;
  • Report de l’ouverture des lacs de pêche de la route 15 (secteur le Boulé) après le 31 juillet;
  • Fermeture de la route 15 entre le lac Racine et le ruisseau Bagsly entre le 15 mars et le 31 juillet;
  • Pour les meutes non répertoriées, production d’une carte des sites potentiels en fonction des critères de sélection d’habitats pour la période de tanière et de sites de rendez-vous;
  • Visite des sites de rendez-vous connus afin d’en faire une caractérisation;
  • Mise en place d’un suivi par caméra trappe pour les endroits identifiés comme potentiels pour la présence de tanières ou de sites de rendez-vous. Cette méthode de suivi, moins invasive que la pose de collier télémétrique, est de plus en plus utilisée pour déterminer le nombre d’individus par meute et l’occupation donnée d’un territoire.

Périphérie du parc national

Le Plan de protection des loups du parc national du Mont-Tremblant a aussi comme objectif d’assurer la stabilité de la population de ce grand prédateur dans l’écosystème régional.

Le loup en tant que grand prédateur requiert un immense domaine vital pour répondre à ses besoins. Celui-ci fluctue en fonction de la densité de proies et des cycles biologiques. La superficie de 1510 km² du parc national du Mont-Tremblant n’est pas suffisante pour répondre à tous les besoins des meutes qui le fréquentent. Les données de télémétrie recueillies le démontrent bien et illustrent à quel point les meutes utilisent les territoires avoisinants. Les efforts déployés au sein des limites du parc national doivent donc pouvoir, eux aussi, rayonner en périphérie. Voici quelques exemples de partenariats à développer, en périphérie du parc, afin de protéger le loup :

  • Rechercher les meilleures façons de pérenniser la présence du loup à long terme, dans le parc et dans sa périphérie;
  • Améliorer les connaissances sur les animaux prélevés en périphérie du parc;
  • Limiter l’avancée du coyote dans la périphérie du parc;
  • Poursuivre l’acquisition de connaissances sur le loup en matière de génétique, d’abondance et de distribution sur le territoire;
  • Encourager la mise en place de corridors fauniques pour assurer la connectivité entre les habitats et favoriser le déplacement de la faune;
  • Favoriser un couvert forestier en périphérie du parc tant en terres privées que publiques;
  • Clarifier la présence, le niveau d’hybridation et la capacité de résilience génétique du loup de l’Est du parc national du Mont-Tremblant et sa périphérie.

Plan de communication

La conférence multimédia Pourquoi les loups? est offerte gratuitement à tous les citoyens et organismes en périphérie du parc. Marie-Ève Boisvenu | © Sépaq

Le Plan de protection des loups du parc national du Mont-Tremblant comprend un volet permettant de solliciter les citoyens des municipalités en périphérie du parc afin de les sensibiliser à l’importance de protéger le loup, un grand prédateur essentiel à la santé des écosystèmes. Le plan de communication qui en découle a comme but premier d’accroître la perception positive du loup par une meilleure compréhension de son rôle écologique. Il a comme objectifs d’améliorer l’acceptabilité sociale de ce grand canidé et de réduire les conflits potentiels liés à sa présence. Pour ce faire, tous les citoyens, municipalités, écoles et organismes en périphérie du parc national du Mont-Tremblant sont invités à communiquer leur intérêt pour l’un ou plusieurs des outils de communication suivants (voir le Guide des outils de communication disponibles pour plus de détails dans la section Pour en savoir plus) :

  • Animation par un garde-parc naturaliste :
    • 1er et 2e cycles du primaire, camps de jour : Le loup : mythes et réalités (jeu questionnaire interactif);
    • 3e cycle du primaire, secondaire et grand public : Pourquoi les loups? (conférence multimédia);
  • Série de six chroniques écrites de 550 à 600 mots chacune : pour les médias locaux, les sites Internet et les bulletins mensuels des différents organismes, etc.;
  • Kiosque d’information et d’animation : idéal dans le cadre d’événements culturel grand public;
  • Affichage de type « campagne de sensibilisation » : panneau routier, « colonne Morris » ou grand format de type « poster »;
  • Panneau d’interprétation : destiné aux amateurs de plein air (randonnée pédestre en particulier).

Principales menaces à l'extérieur du parc

Perte et fragmentation de l’habitat

Les accidents routiers sont l’une des principales causes de mortalité chez le loup. © Shutterstock

Parmi tous les animaux qui habitent nos forêts, le loup est probablement celui qui défend le plus grand territoire pour subvenir à ses besoins (alimentation et reproduction). L’urbanisation, l’exploitation forestière et le réseau routier contribuent à la perte et à la fragmentation d’un habitat de moins en moins sauvage, limitant toujours plus la capacité du milieu à soutenir les grands prédateurs. D’ailleurs, même si l’on retrouve des proies en quantité suffisante, des études faites aux États-Unis et au Québec ont démontré qu’à un certain niveau, le pourcentage de couverture forestière et la densité de routes carrossables à l’année freinaient de façon drastique l’occupation du territoire par les loups. Cette menace est particulièrement problématique pour la cohésion génétique du loup ainsi que l’expansion de l’espèce (dispersion des individus).

Mortalité anthropique

Aujourd’hui, bien fâcheusement, les loups sont encore victimes de préjugés et sujets au braconnage. © Shutterstock

Les accidents routiers, le braconnage, la chasse et le piégeage représentent les causes de mortalité les plus importantes chez les loups de notre région. L’étude sur les loups menée récemment au parc le démontre bien : des 21 canidés capturés, cinq sont morts par piégeage, un par la chasse et un lors d’une collision routière, tous à l’extérieur du parc.

Dans les régions forestières du sud du Québec où le loup est présent, le nombre d’individus par meute est de 5 à 8 loups, en moyenne, dans les endroits non soumis à l’exploitation faunique, tandis que ce chiffre baisse à moins de 4 loups par meute, en moyenne, dans les endroits où il y a de la chasse et du piégeage. De plus, d’autres études ont prouvé que les meutes fortement exploitées ont un faible taux de reproduction, celles-ci étant composées de peu d’adultes et de plusieurs jeunes. Cette pression augmente aussi les risques de croisement entre les loups et les coyotes.

Hybridation avec le coyote

Les résultats de l’analyse de 38 échantillons d’ADN provenant de canidés du parc et de sa périphérie démontrent bien l’hybridation entre les loups et les coyotes. © Sépaq

Dans un milieu naturel non perturbé par l’humain, le loup contrôle en partie les populations de coyotes, qui sont des mésoprédateurs qui s’attaquent à de plus petites proies. Cependant, dans la région du parc national, il en est souvent autrement. Le coyote est présent au Québec seulement depuis le siècle dernier. Favorisé par la fragmentation progressive des habitats, cette espèce nécessite un domaine vital beaucoup plus petit que le loup. Pour le loup de l’Est ou le loup boréal, l’expansion du coyote vers le nord, couplée aux menaces associées aux activités humaines, augmente sa difficulté à trouver un partenaire sexuel. Un haut taux de mortalité d’origine humaine chez les loups aurait donc une influence majeure sur la structure sociale de leurs meutes, amenant ces derniers à être moins exigeant lors du choix du partenaire. Pour les loups du parc et de la région, l’hybridation avec les coyotes, et donc l’affaiblissement génétique des loups, peut représenter une menace importante.

Mesures de conservation

Une vision réaliste du grand méchant loup

Issue d’un fond folklorique commun à toute l’Europe, la célèbre histoire du Petit chaperon rouge, dont la première version écrite est parue en 1697 dans Les contes de ma mère l’Oye de Charles Perreault, n’est qu’un exemple parmi tant d’autres qui a contribué à l’image du grand méchant loup. © Shutterstock

Il est primordial de redonner au loup ses lettres de noblesse, c’est-à-dire de changer l’image et la mentalité des gens face aux grands prédateurs en général, et particulièrement face au loup. En raison de sa mauvaise réputation et des mythes véhiculés à son sujet depuis longtemps, plusieurs personnes ont toujours une peur exagérée de cet animal. Pourtant, les scientifiques s’entendent pour dire que le loup est un animal craintif qui représente très peu de danger pour l’être humain. Les rares incidents recensés en Amérique du Nord dans le dernier siècle étaient tous liés à des individus malades, porteurs de la rage, mal en point ou encore conditionnés à la présence humaine. Ce dernier phénomène, nommée familiarisation, advient lorsqu’un animal, fréquemment approché ou nourri, perd sa peur biologique de l’être humain. Ses habitudes et réactions peuvent alors devenir imprévisibles, l’amenant entre autres à être plus téméraire. C’est pourquoi il est impératif d’éviter tout comportement pouvant mener à la familiarisation, comme le nourrissage des animaux ou la mauvaise gestion des déchets. À titre d’exemple, en favorisant le cerf de Virginie en le nourrissant, on peut provoquer une hausse de sa population dans les milieux humanisés, augmentant par le fait même le risque de dénaturer son principal prédateur : le loup. Peu importe l’espèce, la familiarisation de la faune a toujours des répercussions désastreuses, que ce soit pour l’animal ou pour l’humain.

En vérité, l’influence négative de l’humain sur ce canidé est largement supérieure à toutes les menaces que ce grand prédateur pourrait poser à notre égard. La persistance d’une peur du loup chez certaines personnes serait liée à une méconnaissance de l’animal. Or, bien qu’il soit au sommet de la chaîne alimentaire, le loup cherche à éviter à tout prix la présence humaine en réagissant à celle-ci comme le ferait une proie face à la menace d’un prédateur. Plusieurs études ont d’ailleurs démontré que le loup prend la fuite lorsqu’on l’approche. Il faut dire que son odorat remarquable lui permet de nous repérer de loin, puisqu’il est capable de flairer une proie à plus de deux kilomètres de distance!

La connectivité des noyaux de conservation

Carte qui illustre la vision régionale d’Éco-corridors laurentiens, à titre de modèle seulement, en présentant les noyaux de conservation, qui ne sont pas nécessairement des aires protégées, ainsi que les corridors potentiels qui permettent leur connexion. © Éco-corridors laurentiens

Les loups ont besoin d’immenses territoires sauvages pour survivre. Afin d’assurer leur dispersion et celle de leurs gènes, il advient d’établir une meilleure connectivité entre les aires protégées pour assurer la pérennité de l’espèce, surtout dans le contexte actuel de la fragmentation des habitats du sud du Québec. Il existe plusieurs organismes qui travaillent en ce sens, dont le Réseau de milieux naturels protégés, qui a pour mission de protéger l’environnement dans l’intérêt public en soutenant et en encourageant la conservation volontaire des milieux naturels par les organismes, les municipalités, les propriétaires et les citoyen-ne-s. Tout comme la Fiducie de conservation des écosystèmes de Lanaudière, ces organismes offrent l’aide nécessaire aux propriétaires afin de préserver le couvert forestier de terres privées. Il existe différentes façons de faire pour ce type de conservation, comme le transfert de plein titre à un organisme de conservation, la réserve naturelle en milieu privée, la mise en servitude à perpétuité, la gestion en fiducie, etc.

De plus, Éco-corridors laurentiens, en partenariat avec Conservation de la Nature Canada, travaille actuellement sur un projet majeur de corridors écologiques. Il en existe plusieurs types, mais dans tous les cas, ces corridors sont des segments de terrain sur lesquels pousse une végétation naturelle majoritairement non entretenue. Ils sont essentiels pour relier les différents habitats fauniques. Les corridors écologiques permettent l’accès à de nouveaux environnements et à de nouvelles ressources, évitent l’isolement génétique et offrent le temps à la faune de s’adapter aux changements climatiques (migration vers le nord).

Les passages fauniques

Il est prouvé que les passages fauniques, couplés aux clôtures d’exclusion, sont la mesure la plus efficace pour réduire les taux de collisions avec les grands mammifères. © Shutterstock

Le réseau routier peut représenter une barrière importante ainsi qu’un risque élevé pour plusieurs espèces, particulièrement celles ayant un grand domaine vital comme le loup. Il est important de mieux sécuriser les routes en installant des passages fauniques aux endroits stratégiques, permettant ainsi aux animaux de toutes tailles de circuler au-dessus ou en dessous des grands axes sans risquer leur sécurité, ni celle des automobilistes.

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