Chasse au chevreuil

Les meilleurs conseils de Corinne Gariépy

Par Luc Chartrand

Corinne Gariépy nous accueille dans l’arrière-boutique d’une véritable caverne d’Ali Baba d’équipements de chasse. Propriétaire d'une boutique de chasse et de pêche dans les Laurentides, elle a pris en 2009 la relève de son père, Maurice Gariépy, fondateur du magasin.

Réserve faunique de Papineau-Labelle Réserve faunique de Papineau-Labelle
Réserve faunique de Papineau-Labelle Émile David | © Sépaq

Corinne Gariépy

Elle est donc « tombée dedans quand elle était petite ». À 14 ans, elle a tué son premier ours d’une flèche. Elle était encore adolescente quand elle a abattu son premier chevreuil, il y a 25 ans. « C’est ma vie! » Depuis, elle est devenue une référence dans l’univers de la chasse et de la pêche et elle partage sa passion avec enthousiasme. 

Un animal intelligent…

« Le chevreuil se distingue par son intelligence, souligne-t-elle, et il fait preuve d’une immense capacité à éviter les situations où il est vulnérable. Comme pour tous les gros gibiers, la clé, c’est la connaissance de l’animal que l’on chasse, dit-elle. Il faut donc connaitre sa biologie, ses habitudes alimentaires et son comportement pendant le rut. »

Pratiquement, cela permet de comprendre pourquoi, à un moment précis, un chevreuil passe à un endroit donné. Que ce soit à l’affût dans un mirador ou à la chasse fine – cette dernière n’étant « pas impossible, mais très difficile pour le chevreuil » –, il faut prévoir et anticiper leurs déplacements. Pour cette raison, « la caméra de surveillance devient de plus en plus indispensable, surtout si on chasse dans un mirador. »

C’est ainsi que l’on peut documenter leurs déplacements et ne pas hésiter à changer la position d’un poste d’affût en conséquence.

« On a vu de belles traces et on pense à un gros mâle. Si la caméra nous montre que c’est une femelle avec deux veaux, on va peut-être passer moins de temps dans ce secteur et changer notre stratégie. »

… qui peut faire des erreurs en temps de rut

« Notre chance, c’est de le chasser pendant la période de reproduction. Pendant l’apogée du rut, les mâles font des erreurs. » Occupé à faire des cornages (frottages) ou des grattages au sol, le chevreuil perd une partie de sa vigilance habituelle. Il se développe aussi une rivalité entre mâles qui les rend prompts à bouger pour confronter un rival. Et quand le rut bat son plein, à mesure qu’on avance dans l’automne, les mâles suivent les femelles en négligeant des signes qui, en d’autres périodes, les tiendraient en alerte.

« Pendant cette période, les mâles ne voient plus clair. Un buck mature qui est convaincu qu’il y a une femelle à proximité va avancer nez à terre et, pour lui, il n’y a plus rien qui compte. Ces circonstances dictent l’utilisation de leurres et d’appeaux, dit Corinne. Ce sont des incontournables. »

« Il faut se faire des scénarios. » Le bêlement d’une femelle puis le grognement (rot) d’un mâle sont susceptibles d’intéresser un mâle. « Si on fait un appel de mâle, c’est qu’on veut créer une compétition. On se fait des scénarios. On entrechoque des cornes, artificielles ou pas, et on se crée une petite pièce de théâtre! »

Mais attention : si un chevreuil est en vue ou tout près et qu’on est dans une cache, ce n’est pas le moment d’attirer l’attention sur soi : « On tient ça mort! ». Les bruits de stimulation sont à privilégier quand on veut le faire venir d’un peu plus loin.

Les leurres olfactifs, l’urine synthétique par exemple, lui paraissent moins prioritaires. « On aime ou on n’aime pas », dit-elle.

Comme elle chasse principalement à l’affût, Corinne préfère utiliser des carottes et des pommes (à distance respectable de la cache). Elle pratique aussi une technique moins répandue, celle du champ nourricier. Cela consiste à ensemencer une portion de champ près de la lisière du bois avec des plantes prisées par le chevreuil comme le trèfle ou le brassica. Par contre, concède-t-elle, ce n’est pas à la portée de tous : « Il faut un accès à un terrain propice. On laboure carrément la terre. Ça prend de la machinerie. On enlève les roches, on plante, on met de l’engrais, de la chaux... C’est beaucoup de travail! »

Réserve faunique de Papineau-Labelle
Réserve faunique de Papineau-Labelle Yan Kaczynski | © Sépaq
Réserve faunique de Papineau-Labelle
Réserve faunique de Papineau-Labelle Émile David | © Sépaq
Réserve faunique de Matane
Réserve faunique de Matane Yan Kaczynski | © Sépaq
Réserve faunique de Matane
Réserve faunique de Matane Yan Kaczynski | © Sépaq

Son incontournable

Pour Corinne, la pièce d’équipement la plus utile (mis à part l’arme de chasse, il va sans dire) n’est certes pas la plus coûteuse. Il s’agit d’une petite poire remplie de poudre de talc : une légère pression sur ce contenant de plastique envoie dans l’air un jet de poudre qui, en se dispersant, indique la direction du vent. « Je m’en sers à tout moment. »

Que l’on chasse à l’approche ou à l’affût, le chasseur ne doit jamais oublier dans quelle direction se diffuse sa propre odeur. « L’odorat est le moyen de défense numéro un du chevreuil. Si on est à l’affût et que le vent change de direction, on s’en va! »

En somme, il ne faut jamais hésiter à changer ses plans pour obéir aux caprices d’Éole…

Télémètre

Que ce soit à l’arc ou à l’arbalète, un autre outil essentiel selon elle, est le télémètre au laser. Le télémètre permet de déterminer avec précision la distance qui nous sépare du gibier.

« Surtout au début de l’affût, le premier jour, je pointe plusieurs repères autour de moi : un arbre, une souche, etc. » Une fois ces points et leur distance bien en tête, il n’est plus nécessaire de répéter l’exercice chaque jour. Mais cette précaution est fondamentale quand on veut effectuer un tir fatal plutôt qu’un tir qui blesse. C’est une question de résultat, certes, mais aussi d’éthique de la chasse.

Réserve faunique de Papineau-Labelle
Réserve faunique de Papineau-Labelle Émile David | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Yan Kaczynski | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Yan Kaczynski | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Yan Kaczynski | © Sépaq

Un sac à dos simple et léger

En règle générale, Corinne Gariépy ne privilégie pas le suréquipement. Son sac à dos est le plus petit possible et contient généralement un appeau pour l’appel, des barres tendres, de l’eau, des gants et une tuque. Pour la sécurité, elle apporte toujours un sifflet et un briquet. Pour les femmes, un article de plus en plus en demande alors que celles-ci comptent pour près du quart des nouveaux adeptes de la chasse, un urinoir portatif.

Un sport? Plutôt un mode de vie!

Corinne hésite à parler de sport pour parler de la chasse. « Je dirais un mode de vie, plutôt qu’un sport. »

Et elle est aux premières loges pour observer une renaissance de la chasse au Québec. « Il y a une mode, une redécouverte. Avec la viande bio, notamment. »

« La chasse, ce n’est pas juste le moment de tirer. Ça commence au printemps quand on entame les préparatifs. » (En passant, c’est à la fonte des neiges que le territoire est le plus propice à la prospection pour le chevreuil, alors que les traces du rut de l’année précédente sont encore bien visibles.)

« Et ça se prolonge jusqu’au temps des Fêtes, quand on cuisine et déguste le gibier et qu’on le partage! »

Luc Chartrand

À propos de Luc Chartrand

Luc Chartrand est journaliste et écrivain. Après une carrière bien remplie à L’actualité et à la télévision de Radio-Canada, il se consacre à l’écriture, en particulier sur la chasse et la pêche. Il vient de publier le livre La Grande expérience de la chasse, chez Québec Amérique.

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