Blogue de conservation

Éclairage DEL, bon ou mauvais pour les insectes?

14 mars 2017


Bien qu’il soit déjà connu que les lumières extérieures attirent et tuent les insectes en grand nombre chaque nuit, le type de source lumineuse peut présenter une grande différence dans son pouvoir d’attraction. Est-il possible de s’éclairer adéquatement, de sauvegarder le ciel étoilé, en plus de réduire du même coup les impacts sur les papillons de nuit et autres insectes du soir?

Pouvoir d’attraction

Les quelques études qui existent sur l’attraction des insectes en fonction du type de lumière ne s’entendent pas toujours sur les conclusions. Alors que l’une affirme que les DEL attirent moins les insectes [1], l’autre semble plutôt démontrer l’inverse [2]. Des différences dans la méthodologie et les types de luminaires utilisés peuvent toutefois expliquer cette discordance.

Afin de vérifier si le type d’éclairages utilisé dans la Réserve internationale de ciel étoilé du Mont-Mégantic pour y réduire la pollution lumineuse est bénéfique ou nocif pour les insectes, Alexandre Chéné et Johanne Roby, respectivement étudiant en bioécologie et professeure-chercheuse au Cégep de Sherbrooke, ont élaboré un projet de recherche au parc national du Mont-Mégantic, véritable sanctuaire de noirceur.

mme-insectes-texte-1Figure 1. La professeure Johanne Roby analyse le spectre des luminaires, Alexandre Chéné.

Des pièges lumineux

Pour réaliser l’étude, 3 types de sources lumineuses utilisées pour l’éclairage municipal ont été sélectionnés : le Sodium Haute-Pression (SHP), abondamment présent dans les villes, les DEL blanches 4000 K, qui dominent nouvellement le marché, et les DEL ambre, installées de plus en plus pour réduire la pollution lumineuse. Les luminaires ont été installés au-dessus de pièges en filet pour permettre la capture des insectes attirés par l’éclairage. Au total, près de 5000 insectes ont ainsi été capturés.

mme-insectes-texte-2Figure 2. Les trois types d’éclairage installés au-dessus de pièges en filet sur un site d’étude, Alexandre Chéné.

Des résultats éblouissants

Alors que l’équipe s’attendait à trouver une certaine différence entre les éclairages, les chiffres étaient on ne peut plus clairs : les DEL blanches attiraient 2 fois plus d’insectes que le SHP ou les DEL ambre. De tous les insectes capturés, 47 % l’ont été dans les pièges sous les DEL blanches. Pour chaque nuit, les résultats des analyses étaient les mêmes : le nombre d’insectes capturés sous les DEL blanches par rapport aux autres types d’éclairages était significativement plus élevé, alors qu’aucune différence n’a été établie entre le SHP et les DEL ambre.

Plus spécifiquement pour les papillons de nuit, non seulement près de la moitié ont été attirés par les DEL blanches, mais une grande diversité de familles et d’espèces a aussi été capturée sous celles-ci et, dans une moindre mesure, sous le SHP. Ceci s’explique probablement par la plus grande gamme de couleurs présentes dans les spectres des DEL blanches et du SHP. En comparaison, les DEL ambre ne présentent qu’un faible éventail de couleur jaune-orange et ne sont donc visibles que par un petit nombre d’espèces.

mme-insectes-texte-3Figure 3. Échantillon d’insectes capturés sous DEL blanches, Alexandre Chéné.

Une même solution pour des impacts multiples

Outre la réduction de mortalité de ces espèces importantes pour les écosystèmes, connaître le type de lumière à privilégier pour éviter d’attirer les insectes peut être extrêmement bénéfique pour les régions du monde affectées par des maladies transmises par les insectes comme le paludisme. Avec des impacts négatifs de la pollution lumineuse aussi variés que la perte du ciel étoilé, l’éblouissement et l’influence sur de nombreuses espèces animales, il est rassurant de savoir que les moyens mis en place pour réduire cette nuisance permettent aussi d’atténuer les impacts sur l’entomofaune.

Références

[1] Justice, M., 2016. Light Pollution and Insects: Insect Attraction to Various Types of Residential Lights

[2] Pawson, S. M., Bader, M. K.-F., 2014. LED lighting increases the ecological impact of light pollution irrespective of color temperature, http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1890/14-0468.1/full


Rémi Boucher est garde-parc technicien au parc national du Mont-Mégantic.

Photo de couverture: Alexandre Chéné


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