Blogue de conservation

Au revoir lit 12!

19 avril 2017


En août dernier, au parc national de Miguasha, prenait fin le projet ambitieux de fouilles dans le lit 12 de la Formation d’Escuminac. Entre 2013 et 2016, toute l’attention de nos fouilleurs aura été concentrée sur cette riche couche fossilifère dont le plus illustre « résident » demeure à ce jour Elpistostege, Elpi pour les intimes, véritable icône du site.

Sur les traces d’Elpi

L’intérêt envers le lit 12, une couche sédimentaire, tient avant tout au fait qu’on y a exhumé le seul spécimen entier d’Elpistostege watsoni connu sur la planète. Cette découverte sans précédent ouvre pour le monde de la paléontologie des vertébrés, une opportunité unique d’étudier l’intrigante émergence des tétrapodes,  ou vertébrés à pattes, à partir de leurs ancêtres poissons. En fouillant en détail la « couche à Elpi », c’est littéralement l’environnement de vie, de mort, et d’enfouissement de ce fascinant animal, possiblement le poisson le plus apparenté aux tétrapodes, qui est mis au jour.

Assis sur le lit d’un estuaire de 380 millions d’années

Dès le premier été d’excavation, le lit 12 s’est révélé si bien pourvu en spécimens que la décision a été prise d’y maintenir les fouilles les années suivantes. Qu’ils aient été trouvés à l’état complet ou fragmentaire, tous les fossiles ont été relevés et conservés avec soin. C’est que ces spécimens représentent « la cour » du Roi Elpi, soit l’assemblage d’organismes ayant côtoyé cet imposant prédateur dans les eaux chaudes du paléoestuaire qui existait, il y a 380 millions d’années, à l’emplacement de ce qui deviendra un jour Miguasha.

Au terme de 4 saisons de fouilles ayant connu leur lot d’avaries (Figure 1), c’est quelque 650 nouveaux fossiles qui ont été récupérés. Ce nombre impressionnant de spécimens fait aujourd’hui du lit 12 l’une des 5 couches les mieux documentées de l’ensemble de la séquence fossilifère qui en compte au total 394.

mig-lit12-texte-1Figure 1. Le site de fouille de 2016 (à gauche) et son état suite à une forte marée (à droite), Olivier Matton

Un projet en développement

On sait maintenant que l’assemblage fossile de poissons et de plantes associé à Elpi est dominé par l’acanthodien Homalacanthus concinnus (Figure 2). Gageons que la suite du projet, se transportant maintenant dans le centre de recherche du parc, permettra de révéler la nature de la relation écologique qui a dû exister entre ces poissons à épines et Elpistostege, et à quel type d’environnement précis correspond les dépôts du lit 12, constitués d’un empilement régulier de fines lamines sédimentaires.

mig-lit12-texte-2Figure 2. Spécimen d’Homalacanthus concinnus, un poisson à épines, retrouvé dans le lit 12, Olivier Matton

Des résultats préliminaires de ce projet seront présentés au congrès annuel de l’Acfas qui se tiendra du 8 au 12 mai 2017 à l’Université McGill. À terme, ce projet de recherche en partenariat avec l’Université du Québec à Rimouski permettra de mieux comprendre les cycles biologiques qui pouvaient exister dans le paléoestuaire de Miguasha et, surtout, d’apporter un éclairage inédit sur les facteurs écologiques et environnementaux ayant pu favoriser la transition de l’eau à la terre chez les vertébrés!


Olivier Matton est responsable du service de la conservation et de l’éducation au parc national de Miguasha. matton.olivier@sepaq.com

Photo de couverture:Olivier Matton


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