La chasse au petit gibier

Le choix parfait pour initier un jeune

Par Michel Therrien, guide, chroniqueur et formateur de chasse dont on peut suivre les aventures sur Facebook et Instagram

Dans notre système d’éducation et dans plusieurs disciplines sportives, il y a des échelons à gravir en fonction de notre âge et de nos objectifs. La chasse ne fait pas exception à cette règle. C’est pourquoi les jeunes de la relève et les nouveaux adeptes passent souvent par l’étape de la chasse au petit gibier quand ils apprennent à chasser.

Au Québec, on décrit encore comme de la « petite chasse » la traque d’une furtive gélinotte ou d’un lièvre fuyant. Connaissant bien la réalité une fois en forêt, j’estime pour ma part qu’il n’y a rien de « petit » dans cette grande aventure‑là.

Réserve faunique Mastigouche Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq

Quoi faire et quoi enseigner avant de prendre le bois

On ne naît pas chasseur, mais étape par étape, on devient un chasseur aguerri. Dès le début, la chasse au petit gibier présente de beaux défis. Le premier objectif est de bien maîtriser les règles de sécurité. Ainsi, il faut apprendre à charger et à transporter une arme à feu de petit calibre avant même d’aller en nature. Celle-ci ne devrait jamais être pointée vers qui que ce soit. Une fois que la personne manipule adroitement son arme, on peut songer à organiser une journée de chasse au petit gibier, puis une expédition de chasse au gros gibier avec une arme de calibre supérieur.

Vers l’âge de 4 ans, mon fils, qui a aujourd’hui 14 ans, a reçu en cadeau un petit fusil sculpté en bois. Il va sans dire que cette création artistique unique est rapidement devenue son « jouet » préféré dans la maison et dans le boisé autour. Cependant, même s’il s’agissait d’une arme-jouet inoffensive, je la lui enlevais des mains dès qu’il la dirigeait vers moi. J’ai compris qu’un enfant apprend plus vite quand l’éducation passe par son jouet favori.

Je suggère donc aux parents d’inviter leurs jeunes à les accompagner à la chasse dès l’enfance. Ils peuvent transporter un arc de taille adaptée ou une petite carabine à plomb. À mes yeux, plus jeune on intègre les principes de sécurité, plus vite on acquiert de bons réflexes tout en s’éveillant à la faune et à la chasse. À mes 6 ans, je portais déjà les perdrix que mon père chassait, et mon fils faisait la même chose avec les miennes au même âge.

Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq
Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq

Pour rendre une première expérience de chasse au petit gibier agréable, on peut choisir d’apporter plus d’une arme en forêt : une carabine à plomb à mire arrière fixe, une carabine de calibre .22 avec télescope, un fusil de calibre 20 ou 410 avec moindre recul, etc. Ainsi, le ou la jeune se familiarise avec plusieurs armes et saisit peu à peu la différence entre les systèmes de visée. 

J’aime aussi former un nouveau chasseur en utilisant une cible représentant un petit gibier, par exemple, une image de marmotte ou de lièvre. Je préfère que la personne apprenne directement l’endroit où viser sur le gibier plutôt qu’elle se pratique uniquement avec un rond rouge ou une cannette. Quand une perdrix tente de fuir, il n’y a pas de rond rouge nous indiquant où tirer.

Puis, avant de s’élancer dans les sentiers, on doit essayer diverses positions de tir et connaître quelques notions de balistique. En effet, il est essentiel de bien comprendre la portée de son arme si l’on doit viser une perdrix loin devant soi. Vous me direz que tout ça est enseigné dans la formation requise, mais de plus en plus de jeunes commencent à chasser avec un permis d’initiation qui exige certains apprentissages sur le terrain. 

Avant le départ, on doit également préparer le reste de l’équipement, entre autres les vêtements, les bottes et le sac à dos : les choix doivent être adaptés à l’endroit visité. De plus, j’ai remarqué que la plupart des jeunes aiment se servir d’outils numériques tels qu’un GPS et l’application Avenza Maps. Téléchargés sur leur téléphone, ces derniers leur permettent de s’orienter et de suivre leur progression sur la carte. C’est une excellente responsabilité à leur enseigner, car on ne peut pas traquer de chevreuils ni d’orignaux si on ne sait pas s’orienter en forêt.

Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq
Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq

Avoir l’œil pour reconnaître les bons habitats

Souvent, je croise des chasseurs de petit gibier qui me disent être déçus de ne repartir qu’avec une gélinotte après six heures de chasse où ils se promenaient en auto un peu au hasard. Pourtant, à mon retour au poste d’accueil du même lieu, je jase avec des chasseurs actifs qui ont presque atteint leur limite de prise en 11 km de marche et 21 km de vélo de montagne, GPS à l’appui.

Ça fait 39 ans que je chasse le petit gibier avec intensité : la différence entre une chasse fructueuse et décevante repose généralement sur l’organisation de la journée et le choix des habitats visités. Rouler 120 km en voiture n’est pas très efficace si les routes et les chemins empruntés ne se trouvent pas où vivent les gélinottes, et si de nombreuses autos y circulent.

Ce que les spécialistes révèlent au sujet d’un bon habitat pour le petit gibier mérite notre attention. En effet, pour survivre aux prédateurs ailés comme les buses et les éperviers, les gélinottes ont besoin d’un couvert adéquat, c’est‑à‑dire des obstacles visuels verticaux qui leur permettent de passer inaperçues lorsque l’ennemi plane en silence au‑dessus d’elles.

C’est le même principe pour le couvert au sol : il doit fournir un minimum de cachettes, c’est‑à‑dire des obstacles visuels horizontaux. Pourquoi? Nombreux sont les canidés et les mustélidés qui raffolent comme nous de la chair de gélinotte. Ainsi, les lièvres et les gélinottes évitent de fréquenter les espaces trop ouverts et où la végétation est clairsemée.

Des milieux naturels qui offrent une variété de feuillus et de conifères sont idéaux, car ils créent un effet de « parapluie faunique » pour les gélinottes. Et pour que la perdrix se nourrisse et se camoufle bien, on doit retrouver au sol du feuillage et quelques arbres renversés ou déracinés. Tous les sentiers et anciens chemins forestiers dans ce type d’habitat sont donc à considérer pour une excursion stratégique avec un ou une novice.

Cependant, chasser en marchant n’est pas la même chose que faire une randonnée pédestre, le rythme étant totalement différent. Une chose est sûre, à la chasse, il faut avoir des yeux tout le tour de la tête.  

Réserve faunique des Laurentides
Réserve faunique des Laurentides Émile David | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Mathieu Dupuis | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Alexis Pageau | © Sépaq
Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq

L’observation à son meilleur

Lorsque vient le temps de chasser le petit gibier, il existe plusieurs approches. À titre d’exemple, j’adore en faire quand je suis en vélo de montagne. Les nouveaux vélos de style fatbike (vélos à pneus surdimensionnés) semblent même avoir été inventés pour la chasse. La marche stratégique dans des sentiers plus étroits me réserve aussi son lot de captures. Si je découvre un bon endroit de chasse, je l’identifie sur mon GPS pour m’aider à planifier mes circuits les années suivantes, surtout pratique quand je vais chasser avec des jeunes.

D’ailleurs, une ou deux fois par saison, mon fils amène un nouveau jeune et je vois bien qu’il aime partager sa passion avec d’autres. Comme une journée de chasse est remplie d’explications, d’histoires et de découvertes, les jeunes trouvent souvent l’expérience stimulante. Et ils parlent fréquemment de revenir. 

Ce dont nous parlons notamment est l’art de bien observer, car une perdrix immobile n’est pas comme un panneau routier. En forêt, il faut savoir diriger son regard de gauche à droite et de bas en haut. L’inspection visuelle vers le haut est essentielle, surtout en fin de journée. En effet, les gélinottes passent la nuit dans les arbres et dès que le jour s’achève, elles s’y perchent pour se nourrir de feuilles et de bourgeons. 

Quand les feuilles sont tombées et que la neige recouvre le sol, elles se tiennent encore plus à la cime des feuillus, se nourrissant de bourgeons de merisiers et de bouleaux. Les gélinottes peuvent aussi se percher lorsqu’elles tentent d’échapper à un prédateur, ce qui justifie de regarder au sol et dans les arbres pour trouver une gélinotte qui vient de s’envoler devant nous.

À ce chapitre, notons qu’il est plutôt rare qu’elle parcoure une grande distance dans ce genre de situation. En prenant un moment pour bien s’orienter, on peut habituellement l’apercevoir. Un autre élément à retenir? Une première gélinotte en cache souvent une autre et même une autre… et il arrive que l’on tombe sur une demi‑douzaine d’entre elles. À cet instant précis, ce n’est pas l’action qui manque!

Réserve faunique des Laurentides
Réserve faunique des Laurentides Émile David | © Sépaq
Julie Audet | © Sépaq
Réserve faunique de Portneuf
Réserve faunique de Portneuf Alexis Pageau | © Sépaq
Réserve faunique Mastigouche
Réserve faunique Mastigouche Hooké | © Sépaq

En somme, la chasse au petit gibier est une activité automnale saine, pleine d’aventure et de surprises. La bonne nouvelle, c’est que si on n’attrape pas notre gélinotte, eh bien, il y en aura certainement d’autres. Ce n’est pas toujours le cas d’un chevreuil ou d’un orignal.

Dans cette grande quête qu’est la chasse au petit gibier, chaque pas, chaque coup de feu, chaque moment d’étonnement représentent autant d’étapes significatives vers l’autonomie de la personne qui chasse pour la première fois. Cette expérience se révèlera fort précieuse pour relever les défis de toutes ses futures expéditions de chasse. 

Bonne chasse!

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