Chasse à l’ours

Comment évaluer un spécimen de belle taille?

En collaboration avec Michel Therrien, guide professionnel

En tant que guide de chasse depuis plusieurs années, j’ai constaté l’existence d’un certain folklore entourant la taille des ours observés en forêt.

D’une discussion de bois à l’autre, lorsqu’un ours est observé, il arrive souvent qu’il soit perçu comme étant beaucoup plus gros que sa taille réelle. En effet, quand je mentionne à un chasseur qu’il y a sur son territoire un moyen et un gros ours, il n’est pas rare que l’ours de taille moyenne soit confondu avec celui de plus grande taille. Ce dernier, tant convoité par les chasseurs, a donc plus de chance de poursuivre paisiblement sa vie en forêt.

Mais pourquoi est-ce si difficile de bien évaluer la taille d’un ours? D’une part, l’absence de référent visuel comme un panache amène un défi pour le chasseur de cervidés, habitué d’évaluer la taille d’un candidat potentiel en estimant la largeur du panache ou en comptant ses pointes. D’autre part, la nervosité et la fébrilité peuvent entrer en ligne de compte lorsque vient le temps d’estimer la grosseur de la bête… devant la bête! Mais heureusement, il existe des trucs pour vous aider.

Réserve faunique des Chic-Chocs Réserve faunique des Chic-Chocs
Réserve faunique des Chic-Chocs Éric Deschamps | © Sépaq

Qu’est-ce qu’un ours de belle taille?

Le poids de l’ours varie au gré des saisons. Au printemps après la période d’hibernation, la plupart des ours perdent de 20 % à 30 % de leur masse corporelle à la sortie de leur tanière. (Durant cette période de repos, leur métabolisme fonctionne au ralenti. Par exemple, leurs pulsations cardiaques passent de 40 à seulement 10 battements par minute.) Il y a donc une bonne différence de grosseur entre un ours observé au printemps et un autre aperçu à l’automne.

En règle générale, les ours mâles adultes du Québec pèsent entre 200 et 600 livres. Les femelles quant à elles sont beaucoup plus petites, si bien que l’on parle de dimorphisme sexuel chez les ours noirs à cause de leurs grandes différences physiques.

Selon moi, une femelle adulte pesant 175 livres ou plus au printemps représente une superbe récolte. Il en va de même pour un ours mâle printanier de plus de 250 livres.

Des records

Un des plus gros ours jamais prélevé sur le continent nord-américain provient du Nouveau-Brunswick. En novembre 1976, Joseph Allan a prélevé un ours noir de 902 livres qui venait de blesser mortellement son chien berger allemand. L’ours en question mesurait 7 pieds et 11 pouces. Par ailleurs, un ours de 740 livres a été heurté mortellement par un camion de 18 roues en Ontario. Dans les deux cas, il s’agit presque de gigantisme si on compare à la taille moyenne d’un ours noir adulte relativement âgé et bien alimenté… Mais ça existe.

Réserve faunique de Matane
Réserve faunique de Matane Yan Kaczynski | © Sépaq
Émile David | © Sépaq

Quels sont les indicateurs à observer pour bien évaluer la taille d'un ours?

La longueur et la hauteur

Le premier indicateur est la longueur totale de l’ours. Dans les faits, le physique d’un ours ressemble un peu à celui de l’homme. Si vous avez devant vous un ours de 5 pieds et moins de longueur, du nez à la queue, vous êtes en présence d’une femelle adulte ou d’un jeune mâle. Autrement, si l’ours mesure plus de 5 pieds et demi de longueur, alors vous avez un mâle adulte assez remarquable à votre portée.

La hauteur de l’animal est aussi à considérer. Si elle dépasse 3 pieds, vous êtes en présence d’un sujet plus qu’intéressant.

Afin d’aider les chasseurs à bien évaluer ces mesures, je laisse toujours près de l’appât un gros bouleau blanc de 5 pieds de longueur, ainsi qu’un piquet de 3 pieds planté au sol. Ces deux éléments servent de référents visuels aux chasseurs pour les aider à évaluer la taille de leur prospect. En utilisant un bouleau blanc et un piquet de couleur pâle, on s’assure que ces points de repère contrastent bien avec le pelage foncé de l’ours, permettant ainsi une meilleure observation.

La largeur

Outre la longueur, la largeur de l’ours et son tour de poitrine peuvent nous aiguiller sur sa taille. Comme chez les humains, il y a des ours génétiquement faits en longueur et d’autres, plus larges et costauds. J’ai personnellement prélevé deux ours de plus de 300 livres dont l’un était très long et relativement maigre, tandis que l’autre était plus court, mais trapu et doté d’une belle musculature.

Yan Kaczynski | © Sépaq
Réserve faunique des Laurentides
Réserve faunique des Laurentides Julie Audet | © Sépaq

La tête, les oreilles… et la démarche

La forme de la tête et la largeur des oreilles sont également de bons indices. Un mâle adulte aura une tête plutôt large, arborant possiblement des cicatrices et diverses coupures. Un large front, arborant une ligne et un petit creux en son centre, indique également la présence d’un ours mémorable.

En contrepartie, un ours juvénile aura une tête étroite et son corps sera plus mince. D’instinct, si votre réflexe est de comparer l’ours devant vous à gros chien labrador noir, c’est que l’animal n’est pas de grande taille.

De même, une démarche lourde et pesante — ou, à l’inverse, une démarche plus légère — vous en dira long sur la physionomie de l’ours.

Finalement, les indices trouvés sur le terrain vous aideront à poursuivre la bête de vos rêves. Si vous observez des traces au sol, sachez que la largeur de la trace d’un ours adulte de bonne taille fait environ 5 pouces, en prenant la mesure vis-à-vis des coussinets plantaires. À titre d’exemple, j’ai mesuré des coussinets plantaires d’un mâle de 375 livres au printemps et ceux-ci faisaient 5 pouces et demi de large.

L’attitude et le comportement

Enfin, l’attitude et le comportement de l’animal sur le site sont révélateurs de son rang social au sein de sa bande. Plus le rang hiérarchique d’un ours est bas, plus ses comportements seront précipités, anxieux et sur le qui-vive au moment de se nourrir. Ainsi, un ours mâle juvénile surveillera attentivement la venue d’un ours mâle adulte, à moins qu’il s’agisse d’une femelle intéressée par la reproduction. À l’inverse, quand un ours arrive sur un site avec un comportement de confiance et de domination, il est fort probable que ce soit le mâle dominant du secteur. Durant la période de rut, il arrive aussi qu’un mâle adulte émette des vocalises pour annoncer sa présence, ce qui rend l’expérience encore plus mémorable.

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Vous voilà maintenant prêt et outillé pour traquer la bête de vos rêves et mettre la main sur votre trophée de chasse! Surtout, n’oubliez pas : soyez patients et prenez le temps de bien évaluer la communauté d’ours sur votre territoire. Apportez des jumelles pour vous faciliter la tâche, vous éviterez ainsi les déceptions et serez en mesure de parfaire vos observations. Finalement, si vous désirez approfondir vos connaissances, consultez le billet sur mes meilleurs trucs et maximisez votre expérience!

Bonne chasse!

Michel Therrien

À propos de Michel Therrien

Véritable icône dans le domaine de la chasse au Québec, Michel Therrien a grandi entouré de guides de chasse, de pêche et de trappe. Avec les années, suivre les traces de différents guides expérimentés lui a permis de développer sa passion et une expertise reconnue. Depuis plus de 20 ans, celui qui est également auteur et chroniqueur partage ses connaissances au sujet de la vie animale et de la chasse sportive, et offre des cours de chasse à l’orignal et au chevreuil. Conférencier reconnu, Michel a fondé l’équipe de Chasse Québec et se plaît à réaliser des vidéos et capsules à caractère éducatif. 

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