Blogue de conservation

La grive de Bicknell confirmée au parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie

31 juillet 2012


En juin dernier, une équipe de chercheurs a entrepris une courte expédition vers les hauts sommets du parc afin d’inventorier la grive de Bicknell, une espèce d’oiseaux désignée vulnérable qui affectionne certains habitats particuliers que l'on retrouve au parc. En plus de confirmer officiellement la présence de l’espèce sur le territoire, le passage des chercheurs a permis à l’équipe de conservation du parc d’acquérir de précieuses connaissances sur les méthodes d’inventaires utilisées.

La sapinière de haute altitude, un milieu parfait pour la nidification de la grive de Bicknell

Les arbres qui poussent autour des hauts sommets dénudés du parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie sont particulièrement rabougris et serrés les uns contre les autres. Voilà exactement ce que recherche la grive de Bicknell, qui niche généralement dans des peuplements forestiers montagneux dominés par le sapin baumier, et ce, uniquement dans le nord-est de l’Amérique du Nord.

Une espèce désignée vulnérable mondialement

En raison de son aire de reproduction fortement fragmentée, des différentes menaces à son habitat et de sa population mondiale plutôt petite, cette espèce a été désignée vulnérable par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Au Québec, la grive de Bicknell est également désignée vulnérable par le ministère des Ressources naturelles du Québec. On estime la population québécoise à seulement quelques milliers d’individus.

Une expédition nocturne

C’est lors d’une belle soirée de juin que l’équipe de chercheurs menée par M. Yves Aubry, du Service canadien de la faune, a pris d’assaut le sentier de l’Acropole-des-Draveurs. Bénéficiant d’une autorisation spéciale, les chercheurs ont installé leur campement entre le deuxième et le troisième sommet du sentier, un endroit exceptionnel dont l’accès est très restreint. Camper sur place leur a permis d’être fin prêts pour le début de l’inventaire prévu aux petites heures du matin.

Juste avant l’aube, les grives ont commencé à chanter et l’équipe a installé une série de filets japonais près des peuplements forestiers rabougris des sommets. Spécialement conçus pour attraper les animaux volants, ces derniers ressemblent un peu à des filets de volley-ball une fois installés. On a également fait jouer des enregistrements de chants afin d’attirer des individus dans les filets. Plusieurs se sont approchés, répondant ainsi aux enregistrements. Cependant, aucune capture n’a eu lieu, malgré un effort soutenu qui a duré plus de six heures. Des prises auraient permis de prendre diverses mesures et de procéder à la récolte d'échantillons de plumes et de sang pour faire des analyses génétiques.

Pendant que certains concentraient leurs efforts sur la capture, M. Aubry, assisté d’une garde-parc, a mis sur pied une route d’écoute constituée de cinq stations situées à différentes altitudes. Des cris de grive ont été entendus dans les quatre stations les plus élevées, toutes situées à une altitude supérieure à 700 m.

La confirmation scientifique d’observations faites en 2011

Il faut mentionner que le Service de conservation du parc suivait déjà la présence de la grive de Bicknell sur le territoire. Au cours de l’été 2011, des gardes-parc s’étaient rendus près du sommet du mont des Érables afin de valider les observations ayant été rapportées par des visiteurs. Aussitôt après avoir fait jouer des enregistrements de chants, quelques individus se sont approchés. Fait cocasse, un mâle qui protégeait jalousement son territoire a même approché férocement un des employés!

Un transfert de connaissances important pour le parc

Pour réaliser son inventaire, l’équipe de M. Aubry a appliqué le Programme de suivi des oiseaux nichant en altitude, une initiative citoyenne et scientifique ayant vu le jour au Vermont et dont le but est de suivre une dizaine d’espèces de haute altitude comme la grive de Bicknell. Nous connaissons maintenant mieux cette méthode, ce qui nous permettra, au cours des prochaines années, d’assurer un suivi serré de l’espèce à l’intérieur des limites du parc. Les données récoltées pourront ainsi être inscrites dans la base de données provinciale du Centre de données sur le patrimoine naturel du Québec.

L’importance des milieux protégés pour la grive de Bicknell

Au Québec, certains habitats potentiels de la grive de Bicknell sont menacés par l’exploitation forestière, notamment par les coupes totales et les coupes d’éclaircie. Bien que de saines pratiques forestières puissent atténuer les effets néfastes de cette activité sur l’habitat de l’espèce, les territoires protégés jouent un rôle important dans le maintien des aires de reproduction. En plus du parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie, on retrouve des aires de reproduction très propices à l’espèce dans les parcs nationaux des Grands-Jardins, des Monts-Valin, de la Jacques-Cartier, du Mont-Mégantic et de la Gaspésie. Voilà qui démontre bien l’importance de la mission de conservation des parcs nationaux du Québec.

Pour en savoir plus:
Récit de l’expédition de l’équipe de recherche
Programme de suivi des oiseaux nichant en altitude


Pascal Giguère, responsable du service de la conservation et de l'éducation (par intérim) au parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie, giguere.pascal@sepaq.com.

Photos : Kent McFarland (Vermont Center for Ecostudies) et parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie.


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