Blogue de conservation

Des poissons et des hommes

28 mars 2017


La pêche est une activité sportive très appréciée, mais afin d’éviter qu’elle ne déséquilibre les écosystèmes aquatiques, elle doit être bien encadrée. Des travaux en ce sens au parc national du Mont-Tremblant ont permis d’acquérir des connaissances qui aideront à fixer des seuils de prélèvement adaptés à la réalité des plans d’eau.

Une technique gagnant-gagnant

On oublie trop souvent que la pêche sportive se fait au détriment des espèces convoitées. Les pêcheurs privilégient généralement le prélèvement des plus gros individus, ce qui contribue au déséquilibre des populations en influant sur la taille et l’espérance de vie des poissons.

Afin d’atténuer ces effets, il est nécessaire de limiter les prélèvements annuels. Cette gestion de l’offre permet, par la même occasion, de gérer les stocks de poissons afin d’offrir une activité de qualité tant sur le plan de la quantité que de la grosseur des poissons. C’est grâce aux déclarations quotidiennes des captures faites par les pêcheurs qu’il est possible de faire cette gestion.

mot-gestion-peche-texte-1Figure 1. Poissons étalés dans le plateau de pesée d’une balance, ce qui permet d’obtenir leur masse, une donnée essentielle à la saine gestion de la pêche, Steve Deschênes

Des paniers de pêche bien remplis

La gestion rigoureuse des prélèvements annuels peut entraîner une amélioration de la qualité de pêche. Le lac Tellier en est un bon exemple. En 7 ans, le succès moyen par jour de pêche est passé de 1,7 poisson à 3 poissons, soit une augmentation de plus de 75 %. Au cours de la même période, le poids moyen annuel des poissons y a augmenté de 30 % pour atteindre 490 grammes en 2016. Ce lac, qui n’était que l’ombre de lui-même il y a quelques années, est désormais l’un des plus convoités du territoire.

Lorsque la compétition s’installe dans nos lacs

L’exemple de succès de gestion du lac Tellier est plus marquant encore lorsque l’on tient compte des communautés de poissons qui s’y trouvent. Par le passé, l’omble de fontaine y était probablement exclusif, mais au cours des années 1970, 2 espèces, le méné à nageoires rouges et le tête-de-boule y ont été recensées. On pense que ces poissons auraient été transportés par des pêcheurs les utilisant comme appâts vivants. Au cours des années 1980, c’est le meunier noir et le mulet à corne, 2 espèces très compétitrices avec l’omble de fontaine, qui y sont apparues.

Sachant qu’annuellement les pêcheurs ne prélèvent que les ombles, on comprend que l’espèce soit désavantagée dans la lutte pour les ressources. Aujourd’hui, au parc national du Mont-Tremblant, des quelque 200 lacs où l’omble de fontaine était autrefois l’espèce exclusive, il n’en resterait plus qu’une vingtaine.

mot-gestion-peche-texte-2Figure 2. Omble de fontaine prise par un pêcheur, Steve Deschênes

Vers une nouvelle gestion de la pêche

En 2015 et 2016, une vaste analyse du mode de gestion de la pêche et de l’état global des populations exploitées a été réalisée au parc. Il en ressortait une baisse de productivité notable des lacs, et ce, tant pour l’omble de fontaine que pour le grand brochet, le doré jaune ou le touladi. La présence de compétiteurs qui graduellement s’implantent sur le territoire est un élément d’explication, mais d’autres facteurs plus difficiles à mesurer tels que l’impact des changements climatiques ou des pluies acides de même que les aménagements forestiers d’antan pourraient aussi jouer un rôle. Malgré cette baisse de productivité, la qualité de la pêche au parc national du Mont-Tremblant demeure parmi les meilleures du réseau des parcs nationaux de la Sépaq.

Au cours des prochaines années, les efforts viseront à assurer la conservation des populations et des habitats aquatiques tout en mettant en valeur la pêche sportive. Ceci se matérialisera dans 6 grands objectifs :

  • Gérer de façon durable l’exploitation des poissons;
  • Effectuer une surveillance et une évaluation de l’exploitation;
  • Acquérir et mettre à jour les connaissances sur les espèces de poissons;
  • Restaurer les populations et les habitats qui ont été dégradés par l’activité humaine;
  • Informer et éduquer le public sur la gestion de la pêche et les principes de conservation.

Référence

DORION, É., et H. TENNIER, 2016. Plan de gestion halieutique du parc national du Mont-Tremblant, Lac-Supérieur (Québec), Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq), 153 p.


Hugues Tennier est responsable du service de la conservation et de l’éducation au parc national du Mont-Tremblant. tennier.hugues@sepaq.com

Émilie Dorion est garde-parc technicienne au parc national du Mont-Tremblant.

Photo de couverture: Steve Deschênes


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